Décembre 2010, deux jeunes lorrains souhaitent mettre en avant la culture et l’art de leur région. Ils se mettent alors en tête de
Après plus de six années passées à mettre en avant l'actualité culturelle et artistique de notre région, c'est avec une grande émotion que nous vous annonçons la fin de nos activités. Le site restera cependant actif pour vous permettre de (re)lire les nombreuses rencontres avec les artistes régionaux.
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La compagnie E.R.N.O (Etats de Réalité Non Ordinaire) répète actuellement sa nouvelle création tout public dans une des salles de l’église St Maximin de Metz : Peter Pan ou le Vieil Homme Qui Ne Voulait Pas Vieillir. La Troupe du Jolly Roger, formée par les pirates qui ont survécu à la dernière attaque de Peter Pan, est de retour. Mais, ruinée, elle est condamnée à errer de ville en ville, contant sa propre déchéance auprès des enfants qu’elle déteste afin d’obtenir un repas chaud.
Pour l’occasion j’ai pris le risque de rencontrer l’effrayant capitaine James Crochet, Guillaume Gérard dans la vraie vie. Le jeune homme a pris la décision de laisser pousser sa barbe car il « ne croit pas aux postiches ». Et il a bien raison : les tourbillons de sa moustache sont du plus bel effet. Entretien avec un pirate humaniste…
Lorraine d’Arts : Salut Guillaume ! Avant de parler de la pièce, parle-moi un peu de ton parcours théâtral…
Gérard Guillaume : Après avoir pris des cours pendant 2 ans dans un conservatoire d’arrondissement de Paris, j’ai eu la chance de jouer avec la troupe du théâtre de l’Epée de Bois de 2007 à 2008. J’y ai joué deux spectacles. Les comédiens étaient tous polyvalents, il y avait une véritable cohésion de groupe et j’adorais cela. Le matin on démarrait les répétitions à 8h jusque 14h, maquillés et costumés. J’ai beaucoup appris sur le théâtre du XVIIème. C’était génial et bien loin du conformisme du conservatoire.
LDA : Tu peux nous présenter la compagnie E.R.N.O ? Qu’as-tu déjà eu l’occasion de jouer avec eux ?
G.G : Nous sommes 6. Notre travail s’inscrit bien humblement dans la lignée des compagnies telle que le Théâtre du Soleil, qui ont essayé de renouveler le théâtre avec de petits moyens et surtout de replacer l’Humain au cœur du langage théâtral plutôt que de compter sur une bête vidéo pour imager ce que le comédien n’est pas capable de transmettre par son jeu. Nous avons monté « La Barque de Charon » de Skander Cherqy et nous l’avons présenté lors de la Nuit Blanche 4. C’est un spectacle très noir qui raconte l’histoire d’un clown raté. Il se met en tête de monter une tragédie mais il n’a pas de comédiens. Par ses errances il rencontre deux âmes en peine : un homme rescapé d’Auschwitz et une femme qu’il force à le suivre à grands renforts de GHB.
LDA : On est bien loin des aventures fantastiques et oniriques de Peter Pan !
G.G : On pourrait croire effectivement. J.M Barry devait jouer la version originale avec 30 comédiens et des décors incroyables. Pourtant nous avons monté Peter Pan avec la même démarche que la barque de Charon. On s’inscrit dans la lignée du théâtre nomade du XVIIème, le théâtre de tréteaux, mais avec quelque chose de plus moderne. C’est pour cela qu’on donne l’idée d’un crochet dégueulasse, vieux et aigri. Il n’est pas habillé au temps de son âge d’or. On fait du théâtre avec des petits moyens, sans costume outrancier et onéreux, même les décors ne coutent que 150 euros ! Parce que l’on fabrique tout, qu’on récupère dans la rue, qu’on transforme, qu’on redonne vie comme on peut à du bois mort. On donne l’impression de changement de scène, avec peu de moyen et des matériaux de base comme le bois, le tissu. La musique se limite à des coups de tambours, de cloche. On joue sur l’imagination des spectateurs, c’est eux qui créent l’univers onirique !
LDA : Comment donnez vous du caractère et de la personnalité à vos personnages ? J’ai souvent moi-même pensé qu’un mauvais comédien pouvait se réfugier derrière un costume et une faribole d’accessoires.
G.G : On prend énormément de précautions avec nos accessoires, cela donne de la profondeur aux personnages. Comme on évite les sorties de scène, c’est l’occasion de véritablement endosser nos rôles. Monsieur Mouche (Viktoria Aubert), mon serviteur, prend soin de polir mon épée entre les scènes. C’est tous ces petits gestes qui donnent vie aux personnages.
LDA : Vous répétez et jouez dans une église. C’est surprenant et vraiment original ! Ce lieu ne vous impose pas de nouvelles contraintes ?
G.G : Nous devons ce lieu au Père Boissé qui nous a laissé investir un local à côté de l’église St Maximin. C’est un vrai lieu de répétition. Philippe Boissé nous le laissait à disposition car il espérait dynamiser le quartier Outre-Seille. De manière à lui renvoyer la balle on joue nos spectacles dans l’église, avec un minimum de technique. L’écho particulier du lieu nous a appris à poser nos voix pour faire prendre de l’ampleur au texte. De plus, le français n’a pas d’accent tonique alors ça complique les choses ! Après avoir joué en Espagne, j’ai remarqué la dynamique, le langage plus chantant des hispaniques. En français, même si c’est une belle langue, tout ne chante pas, tout ne rime pas. Alors j’essaie de retrouver une certaine musicalité dans mon jeu.
LDA : Tu m’as parlé du théâtre de tréteaux et de l’aspect social de votre travail avec Mr Boissé. La compagnie E.R.N.O s’inscrit-elle dans une démarche humaniste ?
G.G : Oui c’est vraiment cela ! On perd l’humain de plus en plus. Même sur les affiches on se limite à un effet de lumière avec juste une silhouette. Ce qui a été un vrai déclencheur c’est quand on a joué à Gorze (Moselle). On était tombé sur un couple de parisiens qui venaient nous voir jouer du Baudelaire. Ils avaient adoré. En parallèle, il y avait des amis d’un comédien, des petits jeunes venus plus par solidarité que par réel attrait pour le théâtre. Pourtant ils nous avaient dit avoir trouvé ça trop « chan-mé » [rires] ! C’est la balance entre ces deux avis là qui nous a plu, entre « intellos » et gens qui ont « kiffé » alors qu’ils doivent lire un livre tous les sept ans… Pour moi, Outre Seille est un quartier populaire au sens le plus noble. On voudrait réussir à obtenir les mêmes réactions qu’à Gorze, mais dans un lieu différent d’une MJC ou d’un théâtre classique.
LDA : Votre travail s’inscrit dans une certaine médiation culturelle si je comprends bien…
G.G : Oui, on essaie d’éduquer les jeunes à aimer ce genre de théâtre. On voudrait leur donner goût à ces choses là, éveiller leur esprit critique et qu’on arrête avec cette attitude de consommateur un peu idiote. C’est inutile d’aller au théâtre pour dire qu’on va au théâtre, jouer un spectacle c’est aussi une rencontre humaine.
LDA : Finalement, si tout ceci ne les as pas convaincu, que dirais tu aux gens pour leur donner envie de venir vous voir ?
G.G : La pièce se situe entre l’expressionisme allemand, le cartoon et le théâtre de tréteau ! [rires] On a eu d’excellents retours à notre première en juin. Les gamins avaient vraiment apprécié. Mais il y a plusieurs niveaux de lecture, on ne tombe pas dans l’infantilisation, qui me déplait. C’est juste une petite régression d’adultes. Notre Peter Pan se destine aux jeunes… et aux moins jeunes ! De plus, l’entrée n’est pas payante, on joue « au chapeau ». Tout le monde peut se payer une bonne sortie spectacle et, ainsi, cette rémunération au bon vouloir du public nous oblige à un devoir de qualité. Tout le monde est gagnant !
En savoir plus… |
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Peter Pan ou le Vieil Homme Qui Ne Voulait Pas Vieillir Les samedis 3, 10 et 17 mars 2012 à l’église StMaximin de Metz. Ouverture des portes à 16h, spectacle à 16h30 Entrée libre, participation libre à la fin du spectacle Informations +33 (0)6 47 76 63 76 Site web : http://compagnieerno.blogspot.com/ |
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